Concertation pour le développement de l’éolien offshore : contribution de la Fédération des associations de protection et d’aménagement de la baie de Quiberon, des îles et du Grand Site Dunaire
Regroupant plusieurs associations de protection de l’environnement et du patrimoine de la Bretagne, la Fédération s’est fortement mobilisée contre l’implantation décidée par le Gouvernement pour les éoliennes flottantes de l’AO5, au large de Belle Île, Quiberon et Groix. Elle regrette l’absence de prise en compte des positions présentées par les défenseurs du littoral breton tout au long du débat public mené sous l’égide de la CNDP (1), ainsi que l’absence de recherche de solutions alternatives à un emplacement à moins de 20 km des côtes belliloises, qui, selon la Fédération, aurait aussi bien pu convenir à des éoliennes offshore posées. Elle souligne que, si ce projet est mené à terme, il portera irrémédiablement atteinte à un paysage emblématique des côtes de la Bretagne Sud, tout en affectant négativement les écosystèmes marins, particulièrement fragiles dans cette zone côtière.
Selon la Fédération, la concertation lancée par le Gouvernement pour poursuivre le développement de l’éolien offshore sur la façade atlantique doit être l’occasion de rebattre les cartes, afin de rendre ce développement compatible avec la préservation des paysages et des écosystèmes, et d’éviter de reproduire les désastres de Saint Brieuc et Saint Nazaire. Pour ce faire, il est impératif de s’appuyer sur l’avis 6 juillet 2021 du Conseil national de protection de la nature (CNPN) (2). Celui-ci recommande notamment « d’affirmer une planification respectant les 4 principales directives européennes concernées par la stratégie de la Commission Européenne de novembre 2020 de déploiement important des EMR (3), conciliant tous les enjeux anthropiques (militaires, aviation, navigation commerciale, pêche, aquaculture…) en excluant les projets d’offshore en zones protégées (principalement ZSC-ZPS-RNN-PNM (4) et aires protégées fortes de la SNAP (5) 2030), et en intégrant les points chauds de biodiversité, principalement oiseaux et chiroptères révélés par les études préalables, qui subissent une mortalité directe par les éoliennes, en privilégiant pour l’offshore l’éolien flottant suffisamment distant des rivages y compris pour des raisons paysagères. »
Le CNPN ajoute que « c’est l’exercice qu’ont fait Diaz & Guedes-Soares à l’aide d’un SIG (6) intégrant tous ces facteurs (sauf les points chauds de biodiversité) (7), en l’appliquant justement à la France et l’Ibérie, et qui devrait être reprise et affinée par le MTE (8). Cette étude propose 42 sites d’éolien flottant éloigné des côtes (cf. schéma suivant), accueillant 3000 éoliennes permettant selon ses auteurs de couvrir les besoins électriques de 23 millions d’habitants sur les trois pays soit 32 GW, dont 14,5 GW pour la France, soit le double de la puissance offshore actuelle de l’Europe. »
La Fédération souligne que, lors du débat parlementaire sur le projet de loi d’accélération des énergies renouvelables, qui s’est tenu début 2023, le Gouvernement a argué de la faible maturité technologique des éoliennes flottantes pour refuser un éloignement des parcs à 40 km des côtes. Dans le cas d’installations qui engagent l’avenir environnemental et énergétique de la France sur plusieurs dizaines d’années, cet argument ne paraît pas recevable à la Fédération, et ce à un double titre :
• Si la technique est immature, comment justifier le lancement d’un appel d’offres de 250 MW au large de Belle Île, Quiberon et Groix, dont le coût pour le contribuable pourrait atteindre 2 Md€ (cf. décision d’autorisation d’une aide d’Etat par la Commission européenne), sans attendre les retours d’expérience des parcs expérimentaux implantés le long du littoral français ? Et en quoi une distance à la côte de 19 km, pénalisante pour la faune et les paysages, permettra-t-elle de compenser les effets d’une faible maturité ?
• Les industriels se disent prêts à relever le défi technologique de l’éolien flottant, comme l’attestent les résultats de l’appel d’offre lancé pour l’installation d’un parc au large de la Californie, à une distance moyenne de 90 km des côtes et par 500 m de profondeur (10). Une capacité de 2 GW a ainsi été attribuée en décembre 2022 à Ocean Wind, filiale d’Engie. Avec ce projet, intitulé Golden State Wind, et deux autres sur la côte Est, Mayflower Wind avec la Shell et Bluepoint Wind au large de New York et du New Jersey, Ocean Winds comptera près de 6 gigawatts (GW) d’éolien flottant en développement en Amérique du Nord. Comment expliquer que ce défi soit relevé au-delà de l’Atlantique, mais qu’il soit considéré comme hors d’atteinte en France et en Europe ?