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Région Est : des acteurs témoignent

« Les aides régionales permettent la confiance des investisseurs », Philippe Meinrad

« Depuis 2003, nous nous sommes regroupés à 5 agriculteurs en élevage et grandes cultures avec pour objectif de développer le recyclage et la valorisation de déchets organiques de nos territoires, explique Philippe Meinrad, directeur général de la SAS Agrivalor Energie, située à Ribeauvillé dans le Haut-Rhin. Tout a commencé il y a 20 ans lorsque nous avons décidé de produire nous-mêmes du compost pour avoir notre propre engrais vert. Nous nous sommes rendu compte que les collectivités cherchaient un moyen de gérer leurs déchets verts et nous avons compris alors que nous pouvions aller plus loin dans une démarche concrète d’économie locale durable. En 2008, nous avons découvert la méthanisation en Allemagne en cogénération et nous avons creusé cette idée, d’autant que nous avions été approchés aussi au fil de temps par les cantines scolaires, les restaurants, des entreprises d’agroalimentaire ou vinicoles (petit-lait, marc de raisin…) pour leurs déchets organiques, un complément logique de nos intrants agricoles. Un de nos voisins, le groupe Barrière, nous a fait part de ses besoins en chaleur pour alimenter un hôtel, un casino et un centre balnéoludique. Nous même produisons du fromage et séchons du fourrage, deux autres utilisations pour cette chaleur. Nous avions tous les éléments pour lancer ce projet, les intrants d’un côté et une performance énergétique de l’autre, Grâce à la valorisation de la totalité de l’électricité et un usage de la chaleur produite par la cogénération. Notre objectif était également le retour à la terre du digestat. »

Un projet de territoire

« La réception et la valorisation de déchets organiques, qui représentent aujourd’hui plus de la moitié de nos intrants, impliquent une hygiénisation qui utilise aussi la chaleur de la cogénération. Nous avons également investi en 2018 dans un déconditionneur, avec la Région à nos côtés. Nous sommes convaincus que le recyclage des biodéchets avec un retour au sol a du sens. Nous avons mis en place avec certaines collectivités un tri à la source avec des bacs que nous collectons. Nous avons un recul de plusieurs années dans ce domaine et nous avons de très bons résultats. Je constate que les gens sont prêts pour le tri. Nous, agriculteurs, sommes les mieux placés pour accompagner les collectivités dans ce sens. Nous allons jusqu’à Strasbourg avec un système de collecte auprès des professionnels que nous avons mis en place et qui est réplicable (petits camions, petits bacs). Nous pouvons répondre à la collecte et au traitement. Nous avons aussi développé en interne un suivi de la matière (enregistrement, hygiénisation, caractérisation de la qualité…). Adhérent AAMF, je suis le référent sur le dossier charte qualité et sur le protocole de suivi de l’acceptation des déchets entrant/sortant. »

Une aide et une implication 

« Nous avions déjà été accompagnés par l’Ademe et la Région Grand Est pour notre projet de compostage. Deux acteurs qui nous ont donc également accompagnés à travers le plan chaleur dans cet investissement d’unité de méthanisation qui permet une valorisation de la chaleur et des déchets. Les aides financières que nous avons reçues sont un complément de financement aux emprunts et aux fonds propres particulièrement vital car elles permettent l’impulsion et la confiance des banques qui savent aussi que ces deux acteurs garantissent le sérieux des projets. La Région a bien compris que l’agriculture est un maillon essentiel pour développer une production d’énergie locale durable, pour valoriser nos déchets organiques et ceux du territoire et pour pérenniser nos exploitations. »

La SAS Agrivalor Energie

Coût (HT)

Investissement global : 8 millions € 

- Production du biogaz : 4,9 millions € 

- Équipements de collecte : 455 k€ 

- Réseau de chaleur : 405 k€ 

- Bâtiments, voirie, aménagements divers : 

2,1 millions €

- Études : 130 k€ 

Financement

- ADEME : 891 k€ pour la méthanisation 

- ADEME : 312 k€ pour le réseau de chaleur 

- Union européenne : 500 k€ (FEDER)

- État : 375 k€ 

- Agence de l’Eau Rhin-Meuse : 298 k€ 

Bilan en chiffres 

- 30 000 tonnes de déchets traités 

- 27 000 m3 de digestat produits par an 

- 5 millions de m3 de biogaz produits par an 

- 10 800 MWh de chaleur produits par an 

- 12 000 MWh d’électricité produits par an 

- 5 240 tonnes de CO2 évitées par an 

« L’aide de la Région et sa connaissance des enjeux de terrain sont primordiaux pour la mise en place d’une économie locale durable », Florian Christ.

L’EARL du Haut Village est une exploitation agricole familiale qui comprend un élevage de 150 vaches laitières prim’holstein pour la coopérative Alsace lait et 50 jersiaises pour la fromagerie. Elle est située à Woellenheim, à 25 km à l’ouest de Strasbourg. « Nous avons souhaité agir concrètement pour développer notre activité en suivant une démarche vertueuse sur le plan environnemental et pérenne sur le plan économique, avec notamment une valorisation de nos effluents agricoles, explique Florian Christ, gérant de l’unité. En 2014, nous avons profité de la création d’une nouvelle ligne de distribution de gaz réalisée par Gaz de Strasbourg pour monter un projet de méthanisation reliée à un réseau de chaleur. En service depuis 2015, la SAS Méthachrist est alimentée par les 25 000 tonnes constituées d’effluents de notre exploitation et d’une exploitation voisine ainsi que de résidus d’unités agroalimentaires locales. L’approvisionnement de l’unité de méthanisation est composé de fumier sec, de cannes et de pailles de maïs, de boues industrielles et de déchets de céréales. Les résidus végétaux sont reçus et stockés dans 3 silos bâchés (3x20x75m), le fumier étant pour sa part reçu et stocké dans une plate-forme de 360 m3. Nous sommes équipés d’un module d’hygiénisation et nous produisons 200 Nm3/h de biométhane. En parallèle, nous avons investi dans une chaleur biomasse qui accueille des déchets de bois pour notre fromagerie.

La Direction régionale Grand Est de l’Ademe a soutenu cet investissement en mobilisant les ressources du Fonds Chaleur. Ces aides sont d’autant plus importantes aujourd’hui pour défendre le modèle vertueux de la méthanisation et de la production d’énergie locale que nous avons été confrontés à une explosion du prix de l’électricité. Nous avons d’ailleurs investi dans une petite unité de cogénération pour atteindre l’autonomie énergétique. L’accompagnement de la Région, avec sa vraie connaissance des enjeux locaux, est un réel avantage. Cependant, je constate que, localement, nous arrivons à une saturation de l’approvisionnement en matière. La Région peut, à mon avis, avoir aussi un rôle, en prenant en compte ce critère, pour favoriser un maillage d’approvisionnement local pour éviter les tensions sur le “marché” des intrants.

Ma crainte est aussi que la nouvelle directive nitrate nous empêche d’utiliser notre digestat, un engrais local qui fait partie des vertus durables de la méthanisation, par des interdictions d’épandage à certaines périodes, ce qui nous pousserait à réutiliser des engrais minéraux importés qui consomme énormément d’énergie pour leur fabrication et leur cheminement. Nous aimerions aussi que les responsables chargés de ces directives aient une connaissance du terrain, de l’agronomie, de l’agriculture, au lieu d’être des théoriciens idéologues. Les discussions entre Dreal et chambres d’agriculture sont très tendues, et nous aimerions que la Région puisse faire entendre la voix d’une réelle économie et agriculture durable et locale à opposer à un dogmatisme qui se dit écologique mais pousse en fait à des mesures qui vont totalement à l’encontre du bon sens et favorise une industrie polluante. » 

SAS Méthachrist Woellenheim (67)

Coût (HT)

Coût global : 6,5 millions €

- Génie civil et gros œuvre : 1500 k€

- Production biogaz : 3,8 millions €

- hygiénisation 400 K€

- chaudière biomasse et réseau de chaleur 750 k€

- Prestations intellectuelles : 20 k€

Financement :

- ADEME : 757 k€

- Région pour la chaudière : 393 K€

- Temps de retour sur investissement : 8 ans

Bilan en chiffres

- 25 000 tonnes de matières traitées par an

- 19 500 à 22 000  MWh de biométhane injectés sur le réseau par an

- 25 000 m3 de digestat épandus par an

- 2 500 tonnes de CO2 évitées par an

À propos de l'auteur

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