L’Albertaine Erin Bobicki veut faire de l’hydrogène une ressource majeure du développement énergétique de la province de l’Alberta, au Canada, connue pour l’exploitation des sables bitumineux pour la production de pétrole. Son projet : un réacteur à micro-ondes pour produire de l’hydrogène de manière plus écologique et moins onéreuse.
Erin Bobicki, professeur à la faculté d’ingénierie de l’université de l’Alberta, explique : « Il faut comprendre qu’il y a beaucoup d’hydrogène produit et utilisé en Alberta. Il sert principalement pour des procédés industriels de la valorisation du pétrole. » Erin Bobicki précise par ailleurs qu’une entreprise est en mesure de consommer 10 000 kg d’hydrogène par heure pour transformer le bitume en diesel ou en pétrole.
Elle ajoute que le reformage du méthane à la vapeur est la méthode de production d’hydrogène privilégiée « par les gros consommateurs et producteurs ». Il s’agit de l’hydrogène gris, plus polluant.
L’autre méthode de production d’hydrogène utilise de l’électricité pour séparer l’oxygène et l’hydrogène de l’eau par électrolyse. Si l’électricité est produite à partir d’énergies fossiles, alors cette technique est productrice de gaz à effet de serre (GES).
Erin Bobicki indique : « Nous utilisons près de 80 % moins d’électricité que le procédé d’hydrogène vert, ce qui fait que nous avons une émission de GES plus basse ». En outre, la technologie de son réacteur ne nécessite pas d’eau.
Le réacteur imaginé par Erin Bobicki et Murray Thompson, professeur à la faculté de génie mécanique et industriel de l’université de Toronto (Ontario, Canada), peut donc pallier les problèmes de méthodes de production tout en fournissant de l’hydrogène pour les entreprises et les industries grandes consommatrices d’hydrogène.
La technologie développée par les deux chercheurs utilise les micro-ondes pour chauffer des particules. Au sein du réacteur, des micro-ondes à basse fréquence font « craquer » le méthane pour le transformer en carbone solide et en hydrogène vert par pyrolyse.
L’énorme avantage de cette technique est qu’elle crée non pas une molécule de dioxyde de carbone qui remonte dans l’atmosphère, mais du carbone solide, ce qui réduit fortement les GES lorsque l’hydrogène est produit.
Dans ce cas précis, ce carbone solide doit être utilisé pour optimiser cette réduction de GES. L’idée est alors de proposer des solutions concrètes comme la création d’amendement pour les sols, le remplissage de mines, la fabrication de pneus, voire comme substitut au charbon.
Le marché du carbone solide devrait atteindre 23 milliards de dollars d’ici à 2026.
L’hydrogène peut ainsi jouer un rôle moteur dans la transition énergétique. Au Canada, dans la province de la Colombie-Britannique, le dernier plan économique identifie l’hydrogène comme l’un des éléments clés pour une économie faible en carbone. Cette technique de production d’hydrogène intéresse fortement l’Alberta, qui a lancé plusieurs projets, mais aussi la province de la Saskatchewan avec un projet de centrale d’hydrogène à craquage thermique du méthane.
Le réacteur développé par Erin Bobicki et Murray Thompson produit un kilo d’hydrogène par jour. D’ici à la fin de l’année, ils espèrent en produire 200 fois plus.
Ce projet de réacteur intéresse les territoires reculés, car cela éviterait d’acheminer l’hydrogène par pipeline.
À plus long terme, les deux chercheurs pensent que l’hydrogène pourra remplacer le gaz naturel pour chauffer les habitations, et le diesel pour les transports par camions.
Le projet de réacteur s’est transformé en création d’entreprise : est ainsi née Aurora Hydrogen.