Soutenue par la Région et appuyée par les plans de relance successifs, la filière hydrogène continue de se structurer en Bourgogne-Franche-Comté. Parallèlement, la décarbonation est devenue un enjeu, et un défi, des politiques économiques, tant au niveau national qu’à l’échelle européenne.
Les 29 et 30 septembre 2021, Belfort a accueilli le premier forum Hydrogen Business For Climate. Le choix de cette ville ne doit rien au hasard. « Ce territoire a une légitimité particulière. Depuis les premiers travaux universitaires sur la pile à combustible il y a 25 ans, un véritable écosystème s’est créé ici », a indiqué Marie-Guite Dufray, présidente de la Région. Ainsi, la Région soutient et accompagne plusieurs projets hydrogène. Une feuille de route hydrogène dotée de 100 M€ sur 10 ans a d’ailleurs été adoptée en 2019. S’y sont ajoutés 60 M€ d’investissements dans le cadre du plan d’accélération de l’investissement régional. La Bourgogne-Franche-Comté a été reconnue comme la première région de France pour la représentation de la chaîne de valeur hydrogène. L’accent a notamment été mis sur la formation et la R&D. Résultat, son attractivité pour des projets hydrogène est bien réelle.
Nathalie Loch, chef de projet Hydrogène de l’Agence économique régionale (AER) Bourgogne-Franche-Comté, a indiqué : « Désormais, nous sommes passés dans le dur et l’on voit les retombées ». Cela est vrai avec Mincatec Energy qui a implanté son centre de R&D à Belfort pour développer, mettre au point et tester des réservoirs de stockage solide pour les applications mobiles et stationnaires. Belfort attire réellement les projets, comme celui de H2SYS, société qui travaille sur des groupes électrogènes à hydrogène mobiles et stationnaires de moyenne puissance. Le nouveau site de production de 1 300 m2 a été inauguré dans le parc d’activités Techn’hom. Cette arrivée a fait dire à Philippe Boucly, président de l’association France Hydrogène : « H2SYS est le parfait exemple du changement d’échelle qui s’opère actuellement dans la filière de l’hydrogène. » Belfort finance également un projet de station et de bus à hydrogène dont les travaux débutent avec le soutien d’Hynamics. Ainsi, sept véhicules électriques à hydrogène d’une capacité de 90 personnes seront opérationnels et circuleront dans le Territoire de Belfort au début de l’année 2023.
Gigafactory
La Région a également lancé le projet « Transformation d’un Territoire Industriel » du Nord Franche-Comté qui propose de consacrer 69 M€ pour l’industrie 4.0 et l’économie hydrogène. Sa mise en œuvre a permis de bâtir une coopération durable entre les agglomérations, les universités, les PME innovantes et les groupes industriels basés à Sochaux, Montbéliard et Belfort. De plus, la construction du futur centre d’essais et de certification des systèmes de stockage de l’hydrogène ISTHY, retardée à cause de la pandémie de Covid, devrait être terminée à Belfort courant 2022. C’est aussi à Belfort que McPhy, spécialiste des équipements de production et de distribution d’hydrogène zéro carbone, va installer sa future gigafactory d’électrolyseurs. Notons enfin l’installation du centre d’expertise mondiale sur les réservoirs d’hydrogène de Faurecia à Bavans, près de Montbéliard.
Nathalie Loch a ainsi déclaré : « Pour disposer d’un écosystème robuste et fiable, notre stratégie est d’avoir une chaîne de valeur de l’hydrogène la plus complète possible : de la production au stockage, à la distribution, aux usages mobiles et stationnaires. Il y a un véritable consensus et une belle coordination entre les politiques, les agences et les services de la Région, le Pôle Véhicule du Futur (qui a intégré l’hydrogène à sa feuille de route dès 2005), les entreprises, la formation, le FC Lab (UAR/ Unité d’Appui à la Recherche) et la Plateforme Energie Hydrogène de Belfort, ainsi que les laboratoires de l’UFC (Université de Franche-Comté) et de l’UTBM (Université de Technologie de Belfort-Montbéliard) et des structures comme l’ADEME ou BPI. L’objectif commun est d’offrir un vrai soutien aux porteurs de projets et aux entreprises une fois qu’elles sont là, certaines étant même coachées au démarrage ! »
Les trains à hydrogène
Tous ces projets et toutes ces réalisations poussent un grand nombre d’entreprises françaises, mais aussi étrangères à solliciter l’AER de Bourgogne-Franche-Comté pour présenter ces succès qui attisent l’intérêt. Ainsi, la start-up Mahytec, entreprise leader dans la fabrication de réservoirs de stockage d’hydrogène et de système de stockage d’énergie renouvelable de pointe, a été rachetée par l’allemand Hensoldt, spécialisé dans la production, le stockage, le transport et la conversion de l’énergie à base d’hydrogène. L’entreprise, implantée à Dole dans le Jura, a développé des technologies très innovantes pour le stockage comprimé avec des réservoirs composites et le stockage solide avec des hydrures métalliques. Ce rachat va en outre lui permettre de renforcer ses activités liées à l’hydrogène dans d’autres domaines comme la mobilité lourde et les applications aéronautiques.
Avec le Grand Est, l’Occitanie et l’Auvergne-Rhône-Alpes, la Bourgogne-Franche-Comté est l’une des quatre régions à avoir mandaté la SNCF pour une commande de 14 trains régionaux. Ses trois premiers bi-mode electrique-hydrogène représentent un investissement de 51,9 M€. Ils seront livrés à partir de 2023 pour une mise en exploitation commerciale en 2024, après la validation des essais. Le premier TER devrait circuler entre Auxerre et Laroche-Migennes, véritable hub de la SNCF. L’annonce de cette commande a été faite à Auxerre, qui est par ailleurs l’un des quatre clusters hydrogène de l’écosystème de Bourgogne-Franche-Comté.
En outre, c’est dans la capitale de la Basse Bourgogne qu’a été construite la station hydrogène la plus puissante de France. D’une capacité de 1 MW, AuxHYGen produit jusqu’à 400 kg d’hydrogène vert par jour grâce à l’électrolyse de l’eau. Il s’agit de la première réalisation en France d’Hynamics, filiale d’EDF spécialisée dans l’hydrogène. Cela devrait permettre d’éviter l’émission de 2 200 tonnes de CO2 chaque année. La station alimente cinq bus à hydrogène Safra exploités par Transdev Auxerrois sur le réseau de transport urbain. Elle alimentera par la suite les premiers TER bi-mode électrique-hydrogène développés par Alstom.
Dijon Métropole investit dans l’hydrogène vert
Dijon Métropole a engagé un projet d’hydrogène vert très ambitieux de 100 M€ afin de réduire les émissions de CO2 des transports publics du territoire. Ce projet a été lancé en 2020 et doit bénéficier de la production locale d’hydrogène vert par électrolyse de l’eau pour alimenter les premières bennes à ordures ménagères ainsi que des bus.
Ce projet est basé sur un modèle d’économie circulaire. L’hydrogène vert sera produit localement avec de l’électricité fournie par le recyclage énergétique des déchets venant de la collecte des ordures ménagères des habitants et par la ferme photovoltaïque.
Dijon Métropole met elle aussi un coup d’accélérateur et se positionne en bonne place parmi les territoires moteurs en matière de mobilité hydrogène vert à l’échelle nationale. Ainsi, d’ici à 2030, Dijon Métropole, récemment retenue pour la mission européenne « 100 villes neutres pour le climat et intelligentes », doit faire passer à l’hydrogène la totalité de son parc de véhicules lourds, soit 44 bennes à ordures ménagères et 180 bus. Grâce aux capacités des deux stations d’hydrogène vert, les entreprises et les collectivités locales pourront convertir leurs propres parcs, s’alimenter en hydrogène vert et développer un usage grand public des véhicules à hydrogène.
Afin de mener ce projet à bien, Dijon Métropole s’est associée au groupe local Colibri Énergie. Ce partenariat permettra de développer un véritable système de production, en créant notamment la coentreprise Dijon Métropole Smart EnergHy. Storengy, filiale d’Engie et spécialiste du stockage de gaz et du développement des gaz renouvelables, est entrée à son capital en janvier 2021.
Des projets d’envergure en Franche-Comté
De son côté, la Franche-Comté a lancé plusieurs projets d’envergure. Dans le Doubs, la nouvelle usine Faurecia Clean Mobility a quitté le site de Mandeure pour la zone industrielle de Technoland 2, dans le Pays de Montbéliard. Ainsi, le leader technologique de l’industrie automobile produira des réservoirs à hydrogène pour véhicules dans une usine neuve de 8 000 m2.
La société Gaussin, concepteur et fabricant franc-comtois de solutions de mobilité, a parfaitement commencé l’année grâce à son H2 Racing Truck, premier camion à hydrogène au monde, qui a traversé les dunes lors de la célèbre course du Dakar, en Arabie saoudite, au mois de janvier.
Crédits image ci-dessus : © IDXPROD Severine Regnault.