Hydrogen+. Pouvez-vous nous parler de votre technologie réversible d’électrolyseur haute température pour la production d’hydrogène décarboné ?
Florence Lambert. La technologie est fondée sur la maîtrise de la physique thermodynamique : plutôt que d’électrolyser de l’eau liquide, nous électrolysons de l’eau vaporisée, ce qui est beaucoup plus efficace. La haute température (700 à 800 degrés) offre un véritable intérêt, car elle permet d’utiliser moins d’énergie pour produire de l’hydrogène. Nous disposons de surchauffeurs pour provoquer la réaction et de boîtes hermétiques ; ensuite, la réaction exothermique fonctionne toute seule. Cette étape de maîtrise thermodynamique nous permet de nous positionner dans des conditions favorables avec 15 % de rendement en plus par rapport à de l’alcalin. Dans l’industrie, marché prioritaire de Genvia, nous avons régulièrement à disposition de la chaleur fatale. À partir de 150 °C de chaleur fatale, vous obtenez ainsi 15 % de rendement supplémentaires. Nous obtenons donc un différentiel de 30 % de rendement au total par rapport aux autres technologies d’électrolyse.
Nous ne sommes pas les seuls à développer cette technologie. En revanche, nous disposons de sérieux atouts avec plus de 40 brevets déposés par le CEA, notre partenaire et actionnaire, ce qui nous place parmi les leaders mondiaux. De plus, nous nous sommes associés avec l’industriel Schlumberger, connu pour son ingénierie et ses sites de production. Genvia a été créé en mars 2021, a commencé à produire en octobre 2021 et aura sa ligne pilote à l’été 2022. Tout va donc très vite. Nous sommes certes encore une entreprise jeune, mais notre partenaire, la région Occitanie, et nos deux autres actionnaires, Vicat et Vinci, nous permettent d’accélérer. La décarbonation de l’industrie est quelque chose de très important. Si l’on veut préserver les emplois locaux, il faut justement pouvoir proposer des solutions de décarbonation ou utiliser l’hydrogène décarboné sur les sites de production. C’est au sein de ces créneaux que nous opérons.
Quelles sont les prochaines étapes de développement pour Genvia ?
Nous sommes dans une phase de multiples développements avec l’arrivée à maturité de notre technologie, le lancement de la ligne pilote automatisée cet été et l’ouverture de nos premiers démonstrateurs avec nos partenaires dans les deux années qui viennent. Notre gigafactory sera lancée en 2024 et tournera à plein régime en 2029–2030. Elle générera 500 emplois directs et plus du double d’emplois indirects.
Notre travail est intégré dans l’initiative PIIEC hydrogène (projet important d’intérêt européen commun) qui sera lancée cet été. Mais au-delà de sa propre aventure, Genvia doit fédérer les forces et entraîner tout un écosystème, par exemple en créant des emplois à proximité des sites lorsque cela est possible. Nos objectifs sont multiples, et l’un d’entre eux est de nous concentrer sur le développement des écosystèmes locaux, également en ce qui concerne le contenu carbone que nous produisons et que nous voulons rendre vertueux. Or nous avons l’avantage d’être peu dépendants aux matériaux critiques et nos essais pour les recycler sont concluants.