Dans le cadre de ses cahiers d’acteur, l’AFGNV a souhaité montrer que GNV et bioGNV constituaient une solution dans la décarbonation du transport lourd avec la promesse d’une contribution à la Stratégie nationale bas carbone. Restitution d’un document qui fait la synthèse du marché actuel.
La mobilité liée au gaz naturel pour véhicules (GNV) et au biométhane (bioGNV) connaît un développement continu en Europe, notamment en France, dans le secteur du transport lourd de marchandises et de voyageurs. Les membres de l’AFGNV, les chargeurs et les transporteurs portent cet essor sur le territoire national de manière significative depuis 2014. Les véhicules GNV sont classés Crit’Air 1 et autorisés à entrer dans les zones à faibles émissions. Par ailleurs, des études réalisées par IFP Énergies nouvelles (IFPEN) et Carbone 4, respectivement en 2019 et en 2020, montrent que les véhicules roulant avec du bioGNV ont une empreinte carbone comparable à celle des véhicules électriques équivalents circulant à l’électricité française. Depuis 2017, les véhicules GNV bénéficient de dispositions fiscales particulières que sont le suramortissement pour les poids lourds (comme l’électricité et l’hydrogène) et le gel de la taxe carburant (TICGN carburant). Les adhérents de l’AFGNV, énergéticiens, constructeurs de véhicules, collectivités territoriales et leurs syndicats d’énergies, organisations professionnelles de transporteurs, agriculteurs, réunis au sein de l’Association des agriculteurs méthaniseurs de France, développent avec détermination la gamme de véhicules, le réseau d’avitaillement et l’offre de bioGNV nécessaires pour accompagner la décarbonation du transport lourd routier.
État des lieux
Le réseau de stations GNV se compose de stations raccordées aux réseaux de gaz naturel (distribution et transport) et de stations non raccordées aux réseaux et alimentées par des cuves de gaz naturel liquéfié (GNL). Les premières distribuent exclusivement du gaz naturel comprimé (GNC). Les secondes fournissent du GNC et du GNL. Le GNL, outre l’accroissement d’autonomie des véhicules, offre la possibilité d’installer des stations au plus près des besoins des transporteurs en s’affranchissant de la nécessité d’avoir un réseau de gaz à proximité. Fin 2021, la France comptait 253 points d’avitaillement publics GNV (187 points en GNC et 64 points en GNL). Par ailleurs, fin 2021, il existait 133 stations GNV privées pour les poids lourds (70 pour les bus, 30 pour les camions de marchandises, 27 pour les bennes à ordures ménagères et 6 pour les autocars). Côté véhicules, grâce aux efforts conjugués des membres de l’AFGNV et des acteurs du transport, dont les chargeurs, les poids lourds de 3,5 t et plus roulant au GNV sont passés de moins de 4 000 en 2014 à plus de 15 000 à fin 2021. En 2021, le biométhane utilisé comme carburant a représenté 19,5 % du GNV consommé dans les stations raccordées aux réseaux. C’était 17,5 % en 2020 et 12 % en 2019.
Le développement du GNV est fortement conditionné par le cadre réglementaire. Parmi les nombreuses réglementations européennes, nationales et locales qui s’appliquent à la filière et/ou aux filières concurrentes, trois mesures sont particulièrement structurantes et de nature à générer des obligations en termes de déploiement de véhicules écoresponsables :
• zones à faibles émissions (ZFE) : interdiction de circuler pour les véhicules au-delà d’un certain niveau Crit’Air. Les ZFE constituent actuellement un inducteur majeur du développement du GNV, étant donné que les véhicules diesel seront interdits progressivement dans les grandes villes (ex : date cible de 2024 à Paris) ;
• réduction des émissions de CO2 pour les nouveaux véhicules : obligation pour les constructeurs de réduire les émissions de CO2 de leur production annuelle de véhicules lourds. Le calcul de la réduction des émissions se faisant actuellement à l’échappement, ce mécanisme ne permet pas de valoriser le caractère décarboné du bioGNV ;
• taux de véhicules à faibles émissions lors des renouvellements de flottes : taux minimum de véhicules à faibles émissions lors des renouvellements de flottes de plus de 100 véhicules.
Perspectives horizon 2030
Les travaux conduits par l’État dans le cadre de la Task Force Transition énergétique du transport routier de marchandises et de voyageurs (Direction générale de l’énergie et du climat, Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités et Direction générale des entreprises) montrent que le GNV/bioGNV constitue aujourd’hui, et jusqu’en 2030 au moins, l’alternative la plus crédible au diesel pour le transport lourd, tant en matière d’offre de véhicules que de réseau d’avitaillement en carburant. C’est aussi, aujourd’hui, l’une des solutions de décarbonation opérationnelle de ce même transport lourd. C’est pourquoi l’AFGNV est en train de se doter d’un plan filière qui donnera une vision de la contribution que notre filière pourrait apporter à la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) d’ici à 2030, sous certaines conditions.
L’objectif de la PPE est d’avoir installé entre 140 et 360 points d’avitaillement GNV publics d’ici à fin 2023 et entre 330 et 840 points GNV publics d’ici à fin 2028. Avec 253 points d’avitaillement à fin 2021, la borne basse de l’objectif PPE pour 2023 est déjà dépassée. Fort de la dynamique actuelle de développement (+ 40 % en 2021), la borne basse de l’objectif PPE pour 2028 devrait l’être également.
Côté véhicules, la PPE actuelle affiche, pour le GNV/bioGNV, une ambition de 21 000 camions et 4 900 bus et cars en 2023 et de 54 000 camions et 7 500 bus et cars en 2028. D’après les modélisations prospectives étudiées par l’AFGNV dans le cadre de son plan filière, un scénario haut (en cours d’étude) envisage que le parc de véhicules de 3,5 t et plus fonctionnant au GNV pourrait atteindre 71 000 véhicules en 2030 (6 000 bennes à ordures ménagères, 18 000 tracteurs, 29 000 porteurs, 11 000 autobus et 7 000 autocars). Les objectifs définis dans la PPE, exprimés en termes de véhicules, se comparent avec le projet de scénario haut de la filière pour 2023 et 2028.
Concernant le biométhane injecté, la PPE vise des objectifs de 6 TWh en 2023 et de 14 à 22 TWh en 2028. Fin 2021, la capacité d’injection de biométhane dans les réseaux était de 6 TWh. Elle pourrait être de 12 TWh en 2023, sur la base des projets identifiés. L’estimation de l’ADEME, quant à elle, évalue à 70 TWh l’offre énergétique disponible en 2035, tous secteurs confondus, en matière de biogaz obtenu par voie de méthanisation. Enfin, la SNBC actuelle envisage, à l’horizon 2050, jusqu’à 40 TWh de biogaz pour le secteur du transport routier. Toujours dans le scénario haut évoqué précédemment, l’AFGNV évalue le besoin énergétique des véhicules de plus de 3,5 t à environ 20 TWh en 2030.
20 % de biométhane
Depuis 2014, le GNV, avec une incorporation progressive et constante de biométhane, contribue de plus en plus à la décarbonation du transport routier de marchandises et de voyageurs (près de 20 % en 2021 pour le GNC). Dans son plan filière en cours de finalisation et qui va être présenté ce mois de mars 2022, l’AFGNV donne la vision raisonnable de ses adhérents sur la baisse des émissions de CO2 dont le transport routier pourrait bénéficier avec le GNV à l’horizon 2028 et 2033, les échéances de la prochaine PPE en cours d’élaboration. Cette vision s’appuiera sur la nécessité de raisonner en analyse de cycle de vie dans le cadre de la réglementation européenne sur les émissions de CO2 des véhicules lourds, afin de pouvoir valoriser les gains d’émissions associés à l’utilisation de biogaz. En effet, ce règlement prend en compte les émissions à l’échappement (du réservoir à la roue) et non les émissions liées aux autres étapes du cycle de vie, notamment la production du véhicule et de l’énergie.