À quelques semaines de l’élection présidentielle et des échéances législatives qui suivront, France gaz renouvelables interpelle les candidats sur la nécessité de mettre en œuvre cinq grands chantiers en faveur du développement des gaz renouvelables et ainsi saisir cette « chance pour la France ». Paroles à la filière.
Au programme de ces mesures « d’intérêt énergique national » : relever l’ambition gaz renouvelable, permettre à la filière d’atteindre tout son potentiel en poursuivant son développement, définir un cadre réglementaire adapté et stabilisé, faciliter l’acceptabilité des projets locaux, investir dans les innovations de la filière. Les gaz renouvelables, principalement issus de la méthanisation, possèdent tous les avantages pour participer activement à la décarbonation du mix et à l’atteinte de la neutralité carbone.
Chantier no 1 : relever l’ambition gaz renouvelable
La filière est la seule à dépasser les objectifs fixés par la PPE : elle peut atteindre rapidement les volumes prévus initialement pour 2028 et contribuer activement à l’accélération des objectifs de décarbonation 2030. Par ailleurs, les scénarios de biomasse mobilisable pour la méthanisation, évalués par les études 2021 de l’ADEME, de Nega Watt et de France Stratégie, confirment la disponibilité, en adéquation avec les tendances de production agricole, pour atteindre des objectifs ambitieux.
Les propositions :
• réviser l’ambition nationale dans le cadre de la loi de programmation préalable à la SNBC et la PPE pour viser au moins deux tiers de gaz renouvelable dans la consommation finale à l’horizon 2040 (consommation finale estimée à 280–300 TWh/an) ;
• fixer des objectifs ambitieux de développement des gaz renouvelables dans la future PPE pour dépasser 52 TWh dès 2028 (dont production cogénération).
Chantier no 2 : permettre à la filière d’atteindre son potentiel
Baisse de tarif brutale supérieure à 10 % opérée en novembre 2020 et limitation du tarif aux petites installations risquent de créer un trou d’air dommageable à la structuration de la filière française. De plus, la réforme de l’arrêté ICPE, le socle commun sur les matières fertilisantes et la certification de durabilité RED II engendrent des surcoûts importants non pris en compte dans la baisse du tarif. Parce que la filière s’est engagée à améliorer la compétitivité future du biométhane, la poursuite d’une dynamique suffisante est nécessaire pour atteindre des économies d’échelle et poursuivre la baisse des coûts. Enfin, sachant que la mobilité lourde au bioGNV est une solution plébiscitée pour la décarbonation des transports, elle nécessite des productions locales nombreuses.
Les propositions :
• au minimum, maintenir l’enveloppe de soutien public actuelle (cogénération pour l’électricité renouvelable et injection pour le gaz renouvelable) ;
• stabiliser une trajectoire tarifaire viable pour les nouveaux projets, en tenant compte des coûts induits par les évolutions réglementaires ;
• mettre en place rapidement le mécanisme de Certificats de production de biogaz et en suivre les effets.
Chantier no 3 : un cadre réglementaire adapté et stabilisé
Ces dernières années, de nombreux textes structurants se succèdent pour encadrer la filière, parfois de manière contradictoire (loi énergie-climat, loi climat-résilience, loi mobilité, PPE, RE 2020, RED II…). Cette instabilité ne donne pas de visibilité à la filière et empêche les acteurs (porteurs de projets, investisseurs, bureaux d’études…) de se projeter à moyen et long terme, ce qui freine durablement la croissance de la filière.
Les propositions :
• reconnaître l’intérêt des gaz renouvelables dans les plans énergétiques et climatiques, notamment SNBC et PPE ;
• renforcer la cohérence de la politique de soutien aux gaz renouvelables entre tous les acteurs concernés (ministères, services déconcentrés, ADEME, etc.) ;
• maintenir un cadre réglementaire stable sur des périodes d’au moins cinq ans pour donner de la visibilité aux acteurs et éviter les à‑coups de développement.
Chantier no 4 : faciliter l’acceptabilité des projets locaux
La filière s’engage fortement sur les questions d’acceptabilité, par la signature de chartes régionales de dialogue et de concertation, un contrat de progrès méthanisation pour améliorer les pratiques de la filière. Cependant, les difficultés existent et freinent la croissance de la filière, en premier lieu par un manque d’information et de concertation. Il est important que le développement de sites de méthanisation se fasse en concertation avec toutes les parties prenantes, en particulier les collectivités territoriales, dont les compétences et la proximité en font les acteurs centraux pour traiter ce sujet. Cette acceptabilité est d’autant plus essentielle que les projets de méthanisation sont des projets locaux qui apportent des bénéfices multiples au-delà de la production d’énergie (traitement des déchets, bénéfices agronomiques et environnementaux, emplois…) et répondent à l’obligation légale de collecte et de traitement des biodéchets en offrant un débouché supplémentaire valorisable en méthanisation.
Propositions :
• renforcer l’information des élus locaux et des parties prenantes sur les projets de méthanisation, notamment en appliquant les outils prévus pour les projets électriques ;
• développer l’implication des élus du territoire dans la concertation sur des schémas territoriaux d’injection ;
• permettre aux territoires porteurs de projets de bénéficier de retombées directes : accélérer la mise en place de l’accès gratuit aux collectivités pour les garanties d’origine du biométhane produit sur leurs territoires ; accès à l’énergie renouvelable pour les habitants ; obligation progressive de consommation de gaz renouvelable pour les bâtiments publics ;
• réduire les délais de décisions en cas de recours pour ne pas enliser les projets.
Chantier no 5 : investir dans les innovations
La méthanisation est actuellement la seule technologie de production de gaz renouvelable déployée à l’échelle nationale. Les acteurs français développent les nouvelles technologies innovantes de production de gaz renouvelables : la méthanation, la pyrogazéification et la gazéification hydrothermale, pour atteindre 100 % de gaz renouvelables en 2050. Les territoires et notamment les collectivités attendent un cadre de soutien pour ces solutions qui répondent à leur problématique concrète de traitement des effluents et des déchets résiduels, en alternative à l’enfouissement et l’incinération.
Les propositions :
• mettre en œuvre le plus rapidement possible les appels à projets « filières biogaz innovantes » prévus dans la loi énergie-climat et étendre le dispositif de soutien à d’autres filières de production renouvelable ;
• reconnaître ces filières au même titre que les autres filières performantes de valorisation de déchets (dont exonération de TGAP).