La production de biogaz est un secteur clé de la transition énergétique et se situe au cœur même d’une économie circulaire. Ce secteur en pleine croissance voit son offre de formation s’étoffer et va fournir de nombreux emplois.
La filière biogaz produit de l’énergie renouvelable, mais c’est aussi une activité de recyclage de déchets organiques. Elle permet de conduire l’agriculture vers des pratiques durables, en réduisant fortement l’apport d’engrais chimiques importés et en contribuant à restaurer les sols. Elle crée de la valeur ajoutée et des emplois variés non délocalisables. Une production vertueuse aux multiples atouts. Mais d’où vient le biogaz ?
Un gisement renouvelable
Le biogaz est produit à partir de matières organiques. Pour ce que l’on appelle la méthanisation, il est issu de la digestion par les bactéries de cette matière organique dans un milieu en absence d’oxygène (anaérobie). L’action biologique des bactéries décompose la matière en produisant de 50 % à 60 % de méthane (CH4), mais aussi du CO2 (environ 35 %), de l’eau et d’autres gaz (5 % environ). Le résidu de matières, appelé digestat, est un engrais de bonne qualité. La concentration varie en fonction des matières digérées.
Pour ce qui est des usages, ce biogaz peut ensuite être utilisé tel quel pour servir de carburant aux moteurs de cogénération qui produisent alors de l’électricité et de l’énergie sous forme de chaleur (utilisée pour chauffer, sécher…). Il peut également être épuré (élimination du CO2, de l’eau et d’autres composés) pour obtenir du biométhane, contenant comme le gaz naturel 98% de méthane. C’est un gaz produit biologiquement et de manière renouvelable – et non puisé dans un gisement souterrain comme le gaz fossile, c’est pourquoi il est appelé « biométhane » – qu’il est possible d’injecter dans les réseaux de gaz (c’est bien le même gaz « de ville »). Mais on peut l’utiliser aussi pour la mobilité dans des véhicules équipés d’un moteur GNV, une technologie disponible sur de nombreux modèles, ou d’un moteur GNL (gaz naturel liquéfié) réservé aux gros véhicules, trains ou bateaux. C’est alors un carburant au bilan carbone très bas, facile à recharger, émettant peu de particules fines et permettant une autonomie équivalente à celle d’un véhicule Diesel.
Une filière durable
En France, la législation oblige les exploitants à n’utiliser au maximum que 15 % de cultures spécifiquement destinées à la production de biogaz. Les matières servant à produire du biogaz sont donc forcément constituées pour une grande part de ce qui était auparavant considéré comme des déchets : déchets de tailles ou de tontes, déjections animales (fumier, lisier), déchets de cultures, mais aussi déchets de l’industrie agroalimentaire (végétale et animale). Cette économie du recyclage permet donc le développement d’une activité circulaire sur les territoires avec une meilleure gestion des déchets organiques.
Mais elle apporte aussi à l’agriculture une chance extraordinaire, avec un complément de revenu vital pour la pérennisation économique des exploitations. En effet, les agriculteurs méthaniseurs utilisent également des cultures intermédiaires (CIVE). Ces cultures intermédiaires produites en plus des cultures principales constituent pour les méthaniseurs un apport de végétaux qui n’empiète pas sur la production alimentaire. Mieux encore, bien menées agronomiquement, elles permettent, avec une rotation intelligente de plantes, une couverture végétale permanente, des pratiques culturales durables (labour peu profond, semis direct…) avec une restauration de la biodiversité des sols ! D’autant plus que le digestat en sortie est un fertilisant de meilleure qualité qui permet de réduire les importations d’engrais azotés, voire d’atteindre une autonomie en engrais.
Production locale
« La méthanisation est une richesse pour un territoire, avec la création de trois ou quatre emplois stables par unité pour l’exploitation et de dix emplois par an pour la construction, sans compter qu’elle permet de pérenniser économiquement des exploitations agricoles, en améliorant l’image des agriculteurs, trop souvent incompris », explique Christophe Desessard de GDRF Grand Est.
La production de biogaz est donc une activité locale qui s’inscrit dans un développement durable. Une « énergiculture » promise à un bel avenir, une nécessité même, à l’heure où l’on parle d’une relocalisation des activités indispensable à l’économie. Pour Grégory Lannou, de Biogaz Vallée, « miser sur la méthanisation, c’est miser sur une industrie et des investissements français. Des installations, des pompes, des convoyeurs, ce sont des millions d’euros de valeur ajoutée pour la France ».
« Filière industrielle française, génératrice d’emplois et d’économie circulaire dans les territoires, elle permet aussi la pérennisation de notre réseau gazier », ajoute Anthony Mazzenga de GRTgaz. Alors que la France s’est fixé l’objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, ce qui implique de décarboner totalement notre production d’énergie, remplacer dans les réseaux de gaz une partie du gaz fossile par du gaz renouvelable va devenir une nécessité.
Énergie renouvelable
La méthanisation, c’est aussi, bien sûr, une énergie renouvelable de haute qualité dont la production peut être répartie sur le territoire. Outre une réduction de notre déficit commercial, car le méthane produit n’a plus besoin d’être importé, et une meilleure autonomie énergétique, cela permet le développement de la mobilité durable et la diminution des émissions de CO2 par rapport aux énergies fossiles. Cette énergie offre une souplesse d’usage. « Les énergies renouvelables constituent le moyen le plus efficace pour atteindre ces deux objectifs », explique Jean-Louis Bal du Syndicat des énergies renouvelables. Certes, aujourd’hui, elles ont un coût supérieur à celui du gaz fossile. La filière, encore jeune, travaille d’ailleurs à réduire ses coûts de production. Mais il s’agit d’énergies décentralisées, génératrices de valeur dans tous les territoires, créatrices d’emplois et issues de ressources renouvelables. Le coût sociétal du biogaz, compte tenu de tous ces atouts, est bien moins élevé qu’il n’y paraît comparé à celui du gaz fossile.